Le trouble d’accumulation compulsive (TAC) toucherait 2,6% de la population, et 6% des aîné·es. L’encombrement qu’il entraîne mène souvent les gens touchés vers la précarité du logement et l’itinérance. Afin de nous aider à mieux répondre aux besoins de cette clientèle, La Maison grise de Montréal a offert à nos intervenants et intervenantes une formation sur le sujet.
Le trouble d’accumulation compulsive (TAC) n’est pas une problématique nouvelle, mais la pandémie l’a assurément exacerbée, comme en témoigne Anne-Julie Roy, directrice des services externes à La Maison grise, formatrice et coordonnatrice du CATAC : L’accumulation d’objets et l’acquisition compulsive sont des comportements adaptatifs qui répondent à un besoin, un stress ou qui viennent combler un sentiment de vide; lorsque les personnes accumulatrices sont plus anxieuses, elles ont tendance à accumuler davantage. Même si les personnes accumulatrices sont très attachées à leurs objets, l’encombrement de leur milieu de vie génère beaucoup d’anxiété; l’isolement vécu lors de la pandémie les a contraintes à y être confrontées en permanence. »
L’encombrement peut amener ces personnes à perdre leur logement; les responsables de la sécurité civile ou les propriétaires demandent parfois des correctifs immédiats ou réclament une éviction. C’est alors qu’entrent en scène les intervenant·es, notamment ceux et celles de Diogène.
Myriam Martin, intervenante communautaire au service Toit d’abord, a eu quelques fois à intervenir dans ces situations; « Souvent, nous arrivons avec un sentiment d’urgence, car le dossier se retrouve devant le Tribunal administratif du logement et on doit désencombrer rapidement. Sauf qu’en brusquant la personne, on ralentit plutôt le processus, quand ça ne brise pas carrément le lien de confiance. »
Des apprentissages pertinents sur le terrain
Qu’a appris Myriam lors de sa formation? Premièrement, à mieux comprendre comment pensent les personnes qui vivent avec un TAC :
« J’ai appris que ces personnes voient plein de possibilités dans leurs objets, sans tenir compte de la faible probabilité qu’elles s’en servent, ce qui explique pourquoi c’est si difficile pour elles de s’en départir. J’ai appris à poser de bonnes questions, à semer un doute, sans jugement, et d’accepter que ce soit un processus lent. J’ai aussi retenu qu’il fallait commencer par les choses les moins importantes pour la personne, afin qu’elle vive moins de stress et qu’elle se désensibilise graduellement à la démarche de désencombrement. »
Point intéressant, Myriam a également appris à creuser davantage pour comprendre ce qui amène la personne à accumuler; qu’est-ce que ces objets représentent pour elle, pour son identité, la conception qu’elle a d’elle-même ou les projets qu’elle souhaite réaliser dans le futur? Elle donne l’exemple d’une personne qui est allée à l’université et qui se sent valorisée par tous les livres ou journaux qu’elle possède et qui la tiennent informée; « On peut lui demander la fréquence à laquelle elle utilise ces objets, et si elle pratique d’autres activités qui répondent à ce besoin; si elle nous nomme qu’elle participe à des ateliers, écoute des documentaires, de la musique, etc. … on peut l’amener à voir qu’elle fait plein de choses pour entretenir sa culture générale, et que ses objets ne la définissent pas, qu’elle peut lâcher prise
et s’en départir sans se perdre elle-même. » Une approche qui correspond à celle de Diogène, soit de valoriser l’autonomie et la dignité de la personne que l’on accompagne.
Anne-Julie explique qu’il y a encore bien peu d’intervenant·es formé·es et suffisamment outillé·es pour intervenir dans une situation où la personne vit avec un TAC : « Le TAC est souvent accompagné d’une dépression, d’un trouble relationnel ou d’un autre trouble de santé mentale. Les personnes qui font de l’accumulation ressentent souvent de la honte en plus de la peur de perdre leurs objets, ce qui fait qu’elles demandent de l’aide seulement lorsque le risque d’éviction est très élevé. Les intervenant·es se sentent souvent impuissant·es face à l’ampleur de la situation, l’urgence d’agir, les risques d’itinérance et la souffrance de la personne. Ce type d’intervention nécessite beaucoup de temps et une approche particulière, ce qui fait que nous sommes de plus en plus sollicité·es pour donner de la formation sur ce sujet. »
Des ressources pour répondre à un besoin grandissant
Avec les conséquences de la pandémie, le vieillissement de la population et la crise du logement, nous rencontrerons ces situations de plus en plus souvent.
Si vous souhaitez obtenir de l’aide pour une personne à risque d’itinérance, notre projet de prévention Sentinelle pourrait vous aider.
Pour avoir de l’information sur le TAC, consultez La Maison grise ou le site web de l’Espace TAC.
À tous les intervenant·es, professionnel·les et gestionnaires qui souhaitent se joindre à Diogène au sein du Comité d’action TAC (CATAC) communiquez avec Anne-Julie Roy ; notre objectif est de sensibiliser, former et favoriser le développement de services sur le TAC.